. Qui n'a pas habité à Bujumbura dans les années 1970-80 ne peut pas imaginer l'importance de "Chez Kapa" dans la vie sociale de la ville. Pour commencer le Grec était le seul a faire des croissants et des baguettes à la française. Son café-restaurant était toujours bondé, surtout à l'heure du p'tit déj'.
.. Mon papa, qui avait son bureau dans la proche Rue de l'Industrie, commençait sa journée avec un café au lait et un croissant chez Kapa. À la mi-matinée il retournait pour un café noir, seul ou avec son associé Jules, un ingénieur belge de Liège. À midi il rentrait à la maison pour déjeuner, puis retournait au bureau et à moitié de l'après midi il s'offrait un autre p'tit noir. Souvent il rencontrait des amis et faisait un peu de causette. Des fois je lui faisais compagnie pour manger des croissants à l'œil.
. Et maintenant je vais vous raconter quelque chose d'extraordinaire. En 2012, profitant d' un séjour à Kigali, Dédé et moi nous avons décidé de revoir notre vieille Bujumbura, la ville où on s'était connus quand elle était réfugiée. Le dernier jour, avant notre départ pour Kigali fixé à 8h, j'ai fait tout seul une promenade sentimentale en ville. En Avenue de la Science je suis arrivé chez Kapa. Le café venait d'ouvrir et était encore désert.
. Je suis entré. La même déco qui était déjà rétro dans les années 80 puisque devait remonter aux Fifties et même avant. Rien n'avait changé. Chez Kapa était figé dans le temps. Je me suis assis à une table pour commander un café au lait et un croissant. Kapa lui-même est venu me servir. Il m'a dit tout de suite:
- Vous êtes le fils de l'architecte.
Je l'ai fixé éberlué. La dernière fois que j'avais mis les pieds dans son local c'était en 1988.
. - Mais comment…
. - Je n'oublie jamais les personnes - a répondu le Grec.
- Café au lait et croissant?
Dragor
D
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